Work in progress 2019

J’ai beaucoup de choses à partager mais assez peu de temps pour structurer tout cela dans un exposé détaillé. Alors je me suis dit qu’un petit billet foutraque, ça peut faire du bien aussi parfois.

Des nouvelles de l’espace

Une fois n’est pas coutume, ma salle de classe s’est encore modifiée. Rappelez-vous, je vous avais présenté une nouvelle disposition qui favorisait la coopération chez les élèves, à l’aide de tableaux blancs électrostatiques. Et bien ces fameux tableaux n’ont pas passé l’été…

L’architecte fou de l’Education nationale a autrefois sévi dans mon collège, de sorte que j’officie dans une salle exposée plein sud, largement vitrée, sans volet et sans autre rideaux que des stores à lamelles translucides – ce qui provoque de nombreux désagréments, de la projection impossible à la décimation des élèves de 6e par coup de chaleur. Lorsque j’avais investi dans les tableaux blancs, c’était d’ailleurs, à l’origine, une énième tentative pour remédier à ce problème.

A la prérentrée, lorsque je suis entrée dans ma salle, j’ai immédiatement vu que les tableaux restés aux fenêtres avaient séché au point de craqueler de partout ; des écailles avaient littéralement adhéré à la vitre, et il nous a fallu une bonne heure, à deux et bien équipées, pour tout nettoyer. J’ai choisi de ne pas en remettre : au besoin, les élèves peuvent écrire directement sur la vitre, ça fait moins de travail question nettoyage.

Un tableau électrostatique, utilisé chaque heure, tient environ 6 semaines ; passé ce délai, il n’adhère plus vraiment et il faut le changer. Mes 25 feuilles auront donc servi une année entière. Je ne les ai pas renouvelées. Pourquoi ? Tout simplement parce que, depuis septembre, les élèves ne s’en servent quasiment pas.

Il faut dire que je n’avais pas gardé les tables en îlots. A la place, j’avais créé trois pôles dans ma classe : un autour du tableau, recevant 8 élèves qui pouvaient travailler en deux équipes de quatre ou quatre équipes de deux élèves (vous suivez ?) ; un autour des tableaux électrostatiques (8 élèves en 2X4 ou 4X2) ; et un autour du vidéoprojecteur (8 élèves). Un petit schéma, peut-être ?

classe poles

Dans cette disposition, peu d’élèves ont osé se servir des tableaux, alors même que certains en avaient pris l’habitude l’année dernière.

Cette disposition avait été conçue pour deux cohortes de latin : les 5e, qui n’étaient officiellement que 8 fin juin 2018 ; les 3e qui, suite à une modification de la carte scolaire, ont enfin la possibilité de poursuivre les langues anciennes au lycée : 8 souhaitent entrer en LGT et poursuivre le latin, tandis que les autres, quel que soit leur projet, ne le pourront pas.

Sauf qu’à la rentrée, les 5e n’étaient pas 8 : ils étaient 20. Et que, parmi les 10 élèves de 3e qui ne souhaitent pas entrer en LGT, 6 n’avaient aucun projet d’orientation – et n’en n’ont toujours pas, alors que la fin du 2e trimestre approche… Ajoutez que mon vieux tableau à craie avait disparu, remplacé par un tableau blanc, sur lequel je pouvais donc (enfin !) projeter, et que j’en avais assez de tourner le dos aux élèves avec mon bureau face au mur.

Alors, j’ai encore changé. Ça faisait longtemps que je cherchais un moyen de combiner, au sein d’une même classe, différentes dispositions, adaptées à différents modes de travail. C’est chose faite. Plutôt que me lancer dans une longue description confuse, je vous mets tout de suite le schéma.

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J’ai désormais deux surfaces de projection (mon vidéoprojecteur est sur une table à roulettes) ; en cas de leçon, je me déplace au tableau et toute la classe me voit facilement ; nous pouvons cumuler travaux de groupe (tables en îlot) et travaux individuels ; les groupes sont devant moi, ils surveillent donc davantage leur niveau sonore. Et, last but not least, nous pouvons facilement regrouper des tables pour les conseils de coopération, exercice devenu fort délicat dans la disposition précédente.

Les Comices, le nouveau conseil de coopération

Je l’avais dit dans mon billet sur le conseil de coopération, je réfléchissais au moyen d’apprendre aux élèves les différents rôles du conseil.

J’ai donc détourné le cursus honorum, en attribuant à chaque magistrature l’un de ces rôles :

  • le questeur est le gestionnaire du temps ;
  • l’édile est le gestionnaire de parole ;
  • le prêteur est le secrétaire ;
  • le consul est président.

Et, pour coller davantage aux realia, il y a quatre questeurs, quatre édiles, deux prêteurs et deux consuls. Les élèves doivent suivre le cursus, ce qui fait que je me retrouve à effectuer plusieurs rôles sur cinq comices ; et comme de nombreuses séances ont sauté, nous n’en avons fait que trois…

Le bilan de cette expérience est extrêmement décevant : l’objectif premier (apprendre les rôles), n’est pas du tout atteint. Les conseils sont poussifs, tendus ; certains élèves s’y ennuient franchement. Ils ne maîtrisent pas mieux les magistratures romaines qu’avant, et moi je m’embrouille entre deux organisations. Un seul point positif : l’ordre du jour, modifié pour les comices, est très efficace. Le voici :

  1. évaluation des solutions précédentes : ont-elles été efficaces ? On garde ? On change ? On arrête ?
  2. propositions : les élèves font des propositions de travail, de sujet ;
  3. félicitations : on félicite les brevets validés, les travaux bien menés ;
  4. critiques : on pointe ce qui gêne le travail ;
  5. solutions : on cherche des solutions aux critiques émises ;
  6. agenda : dates importantes à venir, ou date des prochains comices ;
  7. magistratures : désignation des prochains magistrats.

Les propositions émises par les élèves sont passionnantes : j’ai ainsi un groupe de 6 élèves qui commence le grec en 5e, un concours de cuisine romaine est organisée, et la préparation de notre prochain voyage en Italie est sur les rails.

Brevets et chefs-d’oeuvre

C’était le grand changement de l’année, décrit dans ce billet sur l’évaluation sans note. Je consacrerai un billet détaillé en fin d’année, mais je peux déjà révéler quelques éléments.

Du positif

Massivement, les élèves ont investi le brevet d’Aède (lecture à haute voix) et, dans ce domaine, ils ont atteint un niveau jamais vu dans mon établissement (lecture parfaite, « r » roulés, accent tonique en cours).

Les élèves les moins scolaires viennent enfin de comprendre comment ils peuvent tirer parti de ce mode d’évaluation, et commencent à proposer des travaux originaux, voire audacieux. Ça me fait beaucoup cogiter sur la trop grande abstraction des chefs-d’oeuvre demandés.

Les bulletins sont faciles à remplir ; les félicitations en conseil de coopération sont évidentes. Le dispositif est visiblement compris par les parents, qui semblent assez contents, pour ceux qui m’en parlent.

Du négatif

L’autre brevet qui attire les foules est celui de traducteur, mais là, ils ont beaucoup plus de mal : les lacunes en conjugaison française sont telles que, même lorsque la forme verbale est correctement identifiée, le verbe n’est pas correctement traduit !

Je n’aime décidemment pas l’architecture générale du dispositif, qui ressemble beaucoup trop à une évaluation par ceintures. J’y trouve le même écueil que celui évoqué par Freinet et Petitcolas dans leur article sur la mise en oeuvre des brevets : on s’approche trop souvent d’une interrogation écrite. J’ai déjà commencé à élaborer de nouveaux descriptifs, plus proches des brevets de scoutisme.

Le rythme est à revoir : le concept de « semaine des chefs-d’oeuvre » perd les élèves plus qu’autre chose, et les 4e ont préféré les remplacer par une séance isolée dans la semaine ; nous choisissons ensemble ces séances lors des conseils de coopération, afin de s’adapter au calendrier.

Vers la méthode naturelle de lecture… en latin

Je consacrerai dès que possible un billet détaillé sur la méthode naturelle de lecture-écriture (MNLE) adaptée à la langue latine. J’ai multiplié les essais depuis l’année dernière et, sur mes trois niveaux, je trouve les résultats stupéfiants.

Je suis en contact avec un éditeur pour développer des outils permettant de la travailler ; je ne peux pas vous garantir que ce projet aboutira, mais pour le moment, ceci explique pourquoi ce matériel n’est pas encore disponible sur le blog.

Au besoin, vous pouvez toujours jeter un oeil, voire utiliser (comme moi), le Cambridge latin book, dont les 5 volumes sont disponibles en ligne.

Je vous signale au passage que la méthode naturelle est l’objet du 54e congrès international de l’ICEM, qui aura lieu au lycée Le Fresne d’Angers, du 20 au 23 août 2019. Le congrès est ouvert à tous, n’hésitez pas à vous renseigner sur le site de l’ICEM !

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